Photo : vue depuis la plateforme Rayfield
Aujourd’hui direction l’île de Tōshijima de Toba.
C’est la plus grande île de la municipalité et c’est une escapade que je recommande si vous voulez voir de plus près tout ce qui a trait à la vie des pêcheurs.
L’île est divisée en trois quartiers Tōshi, Wagu et Momotori . Pour faire le tour de l’île, c’est possible à pied mais je vous conseille de le faire en vélo.
Prendre le bateau pour vous rendre sur l’île
image : vue depuis la fenêtre du bateau en arrivant au port de Tōshijima
Le début du voyage pour Tōshijima démarre au terminal maritime de Toba qui se trouve juste à côté de la gare à 7 minutes à pied. Pour une traversée de Sadahama, où se trouve le terminal maritime, jusqu’au quartier de Wagu, il faut compter environ une bonne quinzaine de minutes en bateau pour un coût de 550 yen. Je vous conseille de prendre un bateau pour aller directement au quartier de Tōshi (le prix sera le même). La traversée dans ce cas est de 26 min environ.
Vous trouverez les horaires du bateau sur ce lien (en anglais).
Mon astuce : vous pouvez vous rendre sur l’île avec un vélo ; vous arrivez au port de Tōshi et de repartirez au port de Momotori qui est le quartier le plus proche de Toba ! La descente en vélo entre Wagu et Momotori en pleine forêt est vraiment très agréable. Pour votre vélo, il faudra acheter un pass en plus du billet, mais le prix est plus que raisonnable. Comptez 140 yen pour une traversée et 280 yen pour un aller-retour 1 . On vous donnera un bracelet en papier à fixer sur votre vélo
Vous verrez, le fait de prendre le bateau municipal donne déjà un goût d’aventure.
Se perdre dans les rues de Tōshi
En arrivant au port du quartier de Tōshi, n’hésitez pas à vous perdre dans les petites rues et essayer de repérer la marque noire maruhachi ((丸八 ou マルハチ) sur les portes. C’est un chiffre 8 entouré, tracé avec une encre toute spéciale. Elle provient du sanctuaire hachiman (八幡神社) et se compose d’un mélange de cendre de charbon (消し炭) et de l’algue rouge funori (布海苔).
Photo : Nakano Akihiro. Le pont rouge mène au sanctuaire hachiman (八幡神社) du quartier de Tōshi. L’eau du port y est transparente et donne un joli bleu lorsque le temps est au beau fixe.
On l’aperçoit sur les portes des habitations et des commerces, et aussi sur certaines fenêtres. La tradition veut qu’elle protège les foyers du mauvais sort et elle est aussi un talisman pour assurer une bonne prise de pêche toute l’année.
Elle est là pour rappeler que si la mer fascine, elle est aussi dangereuse.
Un plongeon dans l’histoire
Pour ceux intéressés par l’histoire du Japon, des traces de la période Jōmon et Yayoi (si je résume très simplement cela correspondrait à moins de 13 000 av. J.-C à 250 ap. J.-C) ont été retrouvés à Toba et également sur Tōshijima. Sur l’île aujourd’hui se trouve notamment deux tumulus. Le tumulus iwayayama (岩屋山古墳) datant du 6 ème siècle et le tumulus ganiana (蟹穴古墳) datant du7ème siècle.
Si à cette période ancienne l’île était habitée, elle est un peu plus tard dans l’histoire très liée au destin de Kuki Yoshitaka (九鬼 嘉隆 1542-1600) un commandant de la marine durant la période Sengoku du Japon, qui a servi sous Oda Nobunaga puis sous Toyotomi Hideyoshi. A travers le commandement d’une force de pirates japonais, il a dominé la région de la baie d’Ise pendant la période sengoku et a construit le château de Toba en 1594. Sur l’île de Toshima reposent le corps et la tête (pas au même endroit !) du capitaine.
D’ailleurs, une histoire mérite d’être racontée.
En 1600 se passe la bataille décisive de Sekigahara. Cette bataille marque grosso modo la fin de la période troublée de Sengoku et le début de l’ère d’edo sous le règne des Tokugawa. Le capitaine Yoshitaka combattait alors sous la bannière de Ishida Mitsunari, alors que son fils avait rejoint le clan opposé au sien sous le commandement de Tokugawa Ieyasu. Alors que la victoire de Ieyasu est assurée, le capitaine Yoshitaka se tue avec le rituel seppuku alors que son fils avait pourtant garanti sa protection auprès de Ieyasu. La nouvelle arriva malheureusement trop tard…
Aujourd’hui une forte culture de pêche
Façonnée par l’histoire, l’île de Tōshijima est aujourd’hui une île avec une culture et des traditions en lien avec la pêche très fortes. Sur les 2400 personnes qui habitaient l’île en 2014, 80% des habitants avaient une activité en lien avec la pêche. 2
Il y a donc plusieurs communautés d’ama (4 sur l’île) et une centaine d’ama plongent encore notamment pendant la pleine saison, en été.
Dans le quartier de Tōshi vous pouvez apercevoir des amagoya, des cabanes ou se reposent les ama. A gauche vous trouverez une plus grande car elle a vocation à accueillir des touristes et à gauche une plus simple mais disons plus authentique.
Elles sont aussi situées juste à côté de la coopérative de pêche. Normalement cet endroit n’est pas ouvert au public mais vous pouvez le visiter si vous faites partie d’un tour accompagné ou si vous demandez peut être gentiment à l’entrée 🙂
Sur les ports vous verrez sécher des filets colorés au rythme de la pêche qui varie en fonction des saisons .L’eau du port est transparente et donne un joli bleu lorsque le temps est au beau fixe .
Car oui on ne pêche pas la même chose toute l’année et quand on parle de pêche on inclut aussi la culture des algues. L’île de Tōshijima produit notamment de l’algue wakame qui est certifiée avec un éco-label (MEL) depuis 2019. Sur la photo on peut voir du mekabu c’est la partie qui compose le pied de l’algue wakame. Le wakame est récolté entre février et mai. L’algue hijiki est récoltée d’avril à juin, l’algue nori elle de mi-décembre à fin mars.
Côté poisson et crustacés ce sera la même chose en fonction des saisons avec par exemple le poisson jako (じゃこ)entre avril et juillet puis septembre et novembre, le poisson sawara (サワラ) de juillet à décembre à Toshi et Wagu ou encore les huîtres de Momotori de mi-décembre à mars.
Une maniere la plus simple de tester la cuisine locale est de s’arrêter dans un des quelques restaurants de l’île, à l’image du restaurant ronku shokudo (ロンク食堂) reconnaissable avec sa lanterne rouge dans une des rues photogéniques de Toshi
Photo : Nakano Akihiro
Le restaurant est en fait une shokudō. Cela fait référence à un restaurant bon marché et populaire qui serait l’équivalent de notre cantine. D’ailleurs pour ceux qui connaissent la série ou le livre « la cantine de minuit », et bien en japonais le titre se dit shinya shokudō (深夜食堂)
Vous aurez droit a une cuisine typique dans une atmosphère toute spéciale. Par contre je vous conseille d’appeler avant ou prévoir un plan B le service n’est pas garanti tous les jours. !
Lien google map de ロンク食堂
Cette culture de la pêche très forte explique aussi la perpétuation du système neyakoseido donc je vous ai parlé dans cet article. Si ce système existait avant un peu partout à Ise-shima et dans l’ouest du Japon il n’y a qu’à Toshi qu’il perdure. Il a été désigné comme biens culturels immatériels par la ville.
Dans ce système, 5 à 6 jeunes garçons qui viennent de terminer le collège sont pris en charge par une même personne de l’île qui devient leur gardien, appelé neyaoya, et les autorise à venir dormir chez lui. De cette façon, ils renforce les liens entre eux et avec leur gardien comme s’il s’agissait d’une famille adoptive. Le terme neya fait référence autrefois à la chambre à coucher des adolescents et les jeunes sont appelés neyako.
Direction Wagu et Rayfield
Une des vue à ne pas manquer, la plateforme de Rayfield (天望山レイフィールド) avec une vue panoramique sur l’île.
Elle est quelque peu cachée par un océan de verdure. Une fois à Wagu (和具), il vous faudra prendre la direction de la forêt, longer la place et bien dépasser le collège de Tōshi (鳥羽市立答志中学校), ensuite vous trouverez un sentier dans la forêt sur la gauche et après quelques minutes, vous atteindrez la plateforme. Depuis la plage de Wagu il faut compter entre 20 et 25 min de marche beaucoup moins à vélo même si la montée n’est pas facile
Arrivee tranquille à Momotori
La jonction entre Wagu et Momotori est en pleine forêt et l’avantage si vous avez atteint la plateforme Rayfield est que vous n’avez plus ensuite qu’à vous laisser porter par la descente.
Le quartier de Momotori est plus tranquille, on sent une forte solidarité entre les habitants et de la bonne humeur. Situé à l’ouest, le quartier laisse aussi place à des magnifiques couchers de soleil mais pour les apprécier il faudra rester dans une des auberges de l’île !
Ah et pour terminer ne vous étonnez pas si vous ne comprenez pas bien parfois les habitants car le langage des îles, le shimaben 志摩弁(しまべん) est fort et même difficile a comprendre pour les Japonais !
Par exemple vous pouvez essayer ookin-na (おおきんな) pour dire merci. Vous serez sûr de faire un petit effet
A la prochaine Tōshijima !
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